LHJMQ. Une récolte de seulement 26 victoires et 56 points, l’une des pires dans l’histoire des Voltigeurs. Mais surtout, une 17e position au classement général et une douloureuse exclusion des séries éliminatoires, un résultat impensable en début de saison. L’Express a rencontré le directeur général Dominic Ricard pour dresser le bilan de cette descente aux enfers… et jeter un coup d’œil sur le futur de l’organisation.
«Il faut se le dire : c’était une saison de reconstruction. Durant les derniers mois, il a fallu essayer de se rebâtir un leadership, un jeu de puissance, une attaque, une défensive et un gardien; bref, chaque sphère de notre club. Cette équipe-là n’avait aucun point fort, car elle n’avait pas d’expérience. Le résultat est simple : on n’était pas capable de gagner des games de hockey», lance d’emblée celui qui tient les rênes des Rouges depuis maintenant dix ans.
Dès les premières semaines du calendrier, Ricard a senti que son équipe se dirigeait vers une saison rocambolesque. «Il y a eu beaucoup d’incontrôlables. Pas seulement des blessures à des éléments-clés, mais aussi de grosses distractions. Je pense à Verrier et à Beaudoin qui ont vécu de grandes émotions en participant à des camps pros, puis à Golovkovs qui a vécu un choc en étant rejeté par son équipe nationale. C’est sans compter que dès le départ, nos leaders se demandaient juste où ils allaient être échangés aux Fêtes. Je les comprenais, car ils visaient un contrat pro et ils ne sentaient pas que l’organisation était la locomotive de leurs objectifs individuels. À tort ou à raison, car à Boisbriand, Martel était dans une équipe très jeune, mais ça ne l’a pas empêché de décrocher un contrat.»
Parmi les nombreuses déceptions qui expliquent les ennuis des Voltigeurs, notamment en offensive où l’équipe peinait à marquer des buts, Ricard en a identifié trois : les vétérans Lalancette, Golovkovs et Chapman. «Nos plus vieux ont été très décevants. Lalancette et Golovkovs ont été distraits et blessés, mais fondamentalement, ils ont eu de la difficulté à assumer leur rôle de leader et la pression qui vient avec. Prendre charge de l’offensive et garder la tête froide dans des situations corsées, ce n’est pas eux qui l’ont fait : ce sont nos jeunes comme Barré-Boulet et Ratelle.»
Rapidement, Ricard s’est donc résolu à sacrifier ses meilleures valeurs dans l’espoir d’améliorer le futur de l’organisation. À partir du moment où le capitaine Beaudoin et ses acolytes ont été expédiés sous d’autres cieux, les victoires se sont faites de plus en plus rares. Jusqu’à ce que la confortable avance que les Voltigeurs possédaient dans la course aux séries fonde comme neige au soleil…
«Après les échanges, c’était le brouillard total. Alors qu’on s’était affaibli, toutes les équipes derrière nous s’étaient améliorées, ce qui arrive rarement. On a quand même réussi à obtenir le plus haut total de points pour une équipe exclue des séries depuis plusieurs années. Habituellement, 50 points sont suffisants pour faire les séries.»
Remonter dans le temps
Mais au-delà de l’inexpérience, des déceptions et des départs, des raisons plus profondes expliquent la chute vertigineuse des Voltigeurs en 2014-2015. Aux yeux de Ricard, il faut remonter dans le temps pour trouver une explication cohérente.
«Le point central de cette saison, c’est le manque de profondeur et le manque de marge de manœuvre en termes de choix au repêchage. C’est ce qui nous aurait permis de pallier aux blessures. Tout ça, on le savait dès le départ, mais il faut revenir plusieurs années en arrière pour comprendre pourquoi. Quand on a été en haut du classement, durant les saisons 2009 à 2011, on a surfé sur le même noyau de joueurs, puis on a échangé nos bons choix pour avoir du succès en séries. Bref, on a repoussé la neige! Pendant ce temps, on ne donnait pas la chance à nos jeunes de se développer. Un jour, ça a fini par nous rattraper.»
Puis, à la toute fin de ce cycle, en 2011, les Voltigeurs ont été frappés par un autre coup dur qui allait changer le cours des événements : le saut hâtif de Couturier et Palat chez les professionnels. «Ces deux vétérans étaient pour nous des valeurs immenses à monnayer, surtout que c’était une année de Coupe Memorial au Québec. On croyait qu’ils allaient revenir avec nous. Si on avait pu les échanger, ça aurait accéléré notre processus de reconstruction», a fait savoir Ricard, en confirmant la rumeur selon laquelle Couturier devait être échangé à Shawinigan en retour de Dubeau, Racine et Veilleux, ces derniers ayant finalement pris le chemin de Moncton contre Gormley.
Puis, l’an dernier, les Voltigeurs ont atteint la fin d’un autre cycle de trois saisons. Jouant le tout pour le tout, Ricard a une fois de plus hypothéqué le futur de l’équipe en cédant des joueurs (Gauthier, Brouillard et Caouette) et de bons choix (dont son premier cette année) pour mettre la main sur les Gaudreau, Culkin et Carrier. Des échanges qui expliquent pourquoi l’équipe est devenue si vulnérable aux blessures cette saison. Avec le recul, l’homme de hockey ferait-il les choses différemment?
«Non. Il fallait en donner à nos partisans. Ça faisait deux ans de suite qu’on se faisait battre en première ronde. Finalement, on s’est fait sortir par Val-d’Or alors que Carrier était blessé, un élément incontrôlable. On n’était pas si loin des Foreurs, qui ont gagné la Coupe du Président. C’est pourquoi je n’ai aucun regret.»
Une meilleure attaque
Malgré le scénario catastrophe de cette saison, tout n’est pas noir pour autant chez les Voltigeurs. Ricard s’en remet toujours à son plan de trois ans, qui devrait permettre à l’équipe de redevenir compétitive dès 2015-2016 avant d’aspirer aux grands honneurs l’année suivante.
«La saison prochaine, on vise le deuxième tiers du classement et de gagner au moins une ronde en séries. Je ne suis pas inquiet. On va avoir une bonne défensive. Boikov vient de finir l’année à +11 en affrontant les meilleurs attaquants adverses. Il sera le meilleur défenseur défensif de la ligue l’an prochain. Carignan-Labbé et Aubé ont pris une grosse coche cette année. Ils ne régresseront pas l’an prochain, ni Gagné.»
«En attaque, nos trois premiers pointeurs de cette année (Ratelle, Barré-Boulet et Carcone) seront de retour. Barré-Boulet vient de faire 51 points à 17 ans même s’il affrontait les meilleurs défenseurs adverses. Il va en faire combien l’an prochain? Sévigny, Boucher et Pelletier-Leblanc vont aussi progresser et produire plus. Notre attaque était notre problème cette année, mais elle sera bien meilleure l’an prochain.»
Ricard croit aussi que toute l’adversité vécue cette saison aura fait grandir ses jeunes, un peu comme ça s’était produit en 2007-2008. «C’est d’ailleurs le message qu’est venu livrer Vachon à nos joueurs le mois dernier. Tout ce qui était dur cette saison-là, les gars ont trouvé ça facile les années suivantes.»
Pas de Crosby, mais un talent européen
D’ici le début de la prochaine campagne, les Voltigeurs poursuivront leur plan de redressement via les deux repêchages et le marché des échanges (DeLuca). Lors de la séance de sélection du 6 juin, à Sherbrooke, Ricard devra toutefois patienter jusqu’au 18e et dernier rang de la 1re ronde avant de s’exprimer avec le choix de Rimouski. Son propre choix de 1re ronde –le 1er ou le 2e au total, selon le tirage au sort entre les deux équipes exclues des séries–, Ricard l’a expédié au Cap-Breton (Carrier). Cette précieuse valeur a depuis été échangée à Saint-Jean.
«Je ne m’en fais pas tant que ça avec l’idée de ne pas avoir mon 1er choix, car il n’y a pas de joueurs exceptionnels comme Crosby dans le boulier. En fait, il n’y a pas de Couturier non plus. On parle plutôt de joueurs de la trempe d’Audette, Laberge ou Roy. Personne dans ce repêchage ne va virer son club à l’envers en l’espace d’une saison. On va donc profiter de ce repêchage pour réclamer de bons jeunes qui ont du potentiel et qui vont se développer pour éventuellement se greffer à notre équipe.»
«Le repêchage de 2016 sera une bien meilleure cuvée. On l’a bien vu aux Jeux du Québec. J’y ai identifié une dizaine de prospects de la LNH.»
En raison de leur classement à travers la Ligue canadienne, les Voltigeurs possèdent le 4e choix au total du repêchage européen qui aura lieu le 30 juin. «Là, on va réclamer un joueur de 17 ou 18 ans qui devrait nous aider rapidement. On recherche un joueur d’élite mondiale, que ce soit un attaquant ou un défenseur. On veut un gars qui a du talent offensif», a fait savoir Ricard, qui assistera au championnat mondial des moins de 18 ans, en Suisse, à compter du 16 avril.
En vitesse…
L’entrée en scène d’un joueur européen, jumelée au retour du Russe Boikov, signifie donc que le Letton Golovkovs ne fait plus partie des plans des Voltigeurs… Il en va de même pour les Brodeur, Avon, Raymond et Robichaud, qui auront 20 ans la saison prochaine… Devant le filet, les Voltigeurs entendent donner une chance à Fleschler. L’Américain est donc pour l’instant l’unique joueur de 20 ans confirmé en attendant l’arrivée officielle de DeLuca… Les Voltigeurs n’ont pas l’intention de nommer un capitaine avant le début de la prochaine saison. «Personne ne m’a encore convaincu qu’il méritait d’assumer ce titre. On recherche un joueur qui combinera la meilleure attitude, l’éthique de travail, le caractère et la capacité à jouer sous pression»… Alors que l’entraîneur-chef Raymond est encore sous contrat pour une saison, son adjoint Robitaille se retrouve libre, lui qui a été courtisé par Victoriaville et Baie-Comeau l’an dernier. Ricard entend lui faire une proposition prochainement… Contrairement à l’an dernier, les joueurs des Voltigeurs ne seront pas invités à demeurer à Drummondville pour s’entraîner durant l’été. «Je ne suis pas sûr que ça a donné les résultats escomptés. Plusieurs joueurs se sont blessés, d’autres étaient brûlés. Je suis convaincu qu’on a tous besoin de prendre des vacances, émotionnellement et physiquement, pour revenir avec enthousiasme en août. Quand l’école va finir, on va demander aux joueurs de se responsabiliser et d’atteindre leurs objectifs d’entraînement à la maison. On fera quand même des tests physiques en juin pour voir où ils en sont»…